Aujourd’hui je voudrais partager avec vous mon après-midi à la Maison Européenne de la Photographie.
Liu Bolin, Ghost Stories
Je voulais absolument découvrir l’exposition Ghost Stories, autour de l’artiste chinois Liu Bolin alias “l’homme invisible”.
Son nom ne vous est pas inconnu ? C’est tout à fait normal, l’artiste a connu un succès international grâce à sa série Hidding in the City en 2005, série de photographies dans lesquelles il se fond dans le décor.

Liu Bolin, Hiding in the city 104, Mobile Phone, 2012, ©célinedinant
Liu Boling est né en 1973 dans la province de Shangdong en Chine. Il grandit dans une Chine Post Révolution industrielle, qui va connaître de grands bouleversements sociaux et économiques. Tout a commencé en 2005 lors de la destruction par le gouvernement chinois du village d’artiste, Sua Jia Cun, où était son atelier. Très en colère, l’artiste décide de réagir et réalise ainsi sa première œuvre qui associe body art, sculpture vivante, et photographie ; il se fond dans le décor des ruines de son atelier pour dénoncer ce saccage.
« J’ai décidé de me fondre dans l’environnement. Certains diront que je disparais dans le paysage ; je dirais pour ma part que c’est l’environnement qui s’empare de moi ». C’est ainsi que Liu Bolin définit son travail, sa « protestation silencieuse » qui s’articule autour de quatre thèmes majeurs : la politique et la censure du gouvernement chinois, la tradition et la culture chinoise, la société de consommation et la liberté de la presse.
Entre humour et malaise, ses œuvres ont une incroyable puissance symbolique. Ce n’est pas l’œuvre Target, Charlie qui va prouver le contraire. L’artiste a réalisé cette œuvre à Paris en 2015, pour rendre hommage aux victimes de l’attentat.

Liu Bolin, Target, Charlie, 2015, ©célinedinant
Anne et Patrick Poirier ; Vagabondages argentiques, 50 ans de bricolage photographique.
Voici indéniablement mon exposition coup de cœur de la semaine !
Il s’agit de la première rétrospective des photographies du couple d’artistes. 2OO tirages viennent témoigner de leur voyage artistique autour de la mémoire et de la fragilité des civilisations et de la nature.
Anne et Patrick se rencontrent lors de leurs études aux Arts décoratifs. Après de nombreux voyages, ils passent trois ans à Rome au sein de la prestigieuse villa Medicis. C’est à ce moment là qu’ils décident d’unir leur talent et sensibilité pour travailler ensemble.
Confrontés dès leur plus jeune âge aux bombardements, qu’il s’agisse de la ville de Marseille pour Anne et celle de Nantes pour Patrick (bombardements pendant lesquels il perd son père) ; c’est tout naturellement que l’œuvre conjointe du couple questionne la fragilité des cultures et des êtres, l’importance de la mémoire, la puissance évocatrice des ruines.

Anne et Patrick Poirier, Roma memoria mundi, 1988, ©célinedinant
Partageant le même intérêt pour le voyage, ils visitent et procèdent à de nombreuses fouilles de sites et vestiges antiques. Cette découverte du monde leur permet d’analyser et comprendre les cités anciennes et notamment leur destruction. Les ruines ont une place essentielle dans l’ensemble de leur œuvre, symbole du passage du temps, de la fragilité et la vulnérabilité des civilisations mais également synonyme de transmission et de continuité.

Anne et Patrick Poirier, Paysages révolus, Sélinute, 1973-1974, ©célinedinant
De nombreuses expositions ont déjà été consacrées à ces deux artistes pluridsciplinaires, autour de leurs sculptures ou installations mais il s’agit ici de la première focalisée sur leur œuvre photographique.

Anne et Patrick Poirier, Métaphore, de la série Champignons, 2009, ©célinedinant
Ce medium est pourtant extrêmement important et ce dès le début de leur œuvre. De part la fragilité même de son support, surface sensible et éphémère, la photo métaphorise parfaitement leur questionnement autour de la disparition, l’oubli et la fragilité des choses et des êtres. De plus, l’argentique leur permet des détournements par le biais de la lumière ou de produits chimiques, comme pour la série Roma memoria mundi pour le couple qui ne cherche aucunement à voir la réalité des choses mais bien au contraire à lui faire dire d’autres choses.
[…] société de consommation et la liberté de la presse. Pour en savoir plus, découvrez mon article Un dimanche à la MEP et mon coup de coeur pour le coupe […]